Collectif pour les droits des femmes

 

LES FEMMES : PREMIERES VICTIMES D’UN SYSTEME DE RETRAITES INJUSTE ET INCOMPLET

 

 

De fortes inégalités entre les hommes et les femmes à la retraite…

 

? En 2001, les femmes retraitées ont touché en moyenne 848 € par mois et les hommes retraités 1461 €, soit 73% de plus que les femmes. Ce sont les femmes retraitées les plus âgées qui ont les retraites les plus faibles.

? En ce qui concerne les seules pensions de droit direct (c'est à dire hors bonifications pour enfants et hors réversion), les femmes ont touché 650 € et les hommes 1383 €, soit plus du double.

? La situation des femmes qui ont travaillé comme non salariées est particulièrement critique car elles perçoivent des pensions particulièrement faibles.

? En 1997, 3 retraités sur 10 ont perçu une retraite inférieure au minimum vieillesse : parmi eux, 83% de femmes. Ces faibles retraites concernaient 41% des femmes et 11% des hommes.

? En conséquence, les femmes prennent en moyenne leur retraite 2 ans plus tard que les hommes pour augmenter leur trop faible nombre d'annuités de cotisation et partir avec une meilleure retraite…

 

… qui sont le reflet des inégalités professionnelles et sociales

 

La retraite reflète et amplifie les inégalités de la vie professionnelle et sociale. Le rapport du salaire moyen des hommes à celui des femmes est de 1,25 mais le rapport de leur pension dépasse 1,7.

Or, les femmes assurent l'essentiel des responsabilités en matière d'éducation des enfants, de tâches domestiques et de soins aux proches. Ces charges, ainsi que les éventuelles interruptions pour élever les enfants pénalisent leur carrière professionnelle. Salaires et durées de cotisations plus faibles expliquent leurs plus faibles retraites.

Malgré la persistance des inégalités de salaire entre hommes et femmes, les inégalités de retraite tendaient à se réduire au cours du temps : l'activité des femmes ne cesse de s'accroître.

Cependant, cette tendance à la réduction des écarts va se ralentir, voire s'inverser avec le développement des emplois précaires et du temps partiel, qui concernent essentiellement les femmes, et avec les mesures Balladur de 1993. Parmi celles-ci, l'allongement de la durée de cotisation de 37,5 à 40 ans et le passage des 10 aux 25 meilleures années pour le calcul du salaire de base pénalisent beaucoup plus les femmes parce qu'elles ont des carrières écourtées et fractionnées.

Des dispositifs prenant en compte les particularités des carrières des femmes restent donc nécessaires.

 

Il faut donc changer la logique des systèmes de retraites !

 

Les régimes de retraite ont été conçus pour des hommes travaillant à temps plein et sans interruption de carrière, dans un rôle de soutien de famille. Les femmes étaient cantonnées dans des rôles d'épouses et de mères, et plus que de droits propres, elles bénéficiaient de droits dérivés. La logique qui domine cette architecture est une logique de protection des femmes. Le système, tout en ayant évolué, se révèle toujours inadapté pour assurer une retraite décente aux femmes ; il est également inadapté au vu de l'objectif d'égalité entre les hommes et les femmes.

 

La logique d'égalité implique de généraliser les droits individuels en remplacement des droits dérivés. Elle implique aussi d'être accompagnée de politiques familiales et fiscales cohérentes pour favoriser cette égalité (par exemple en Suède, les avantages du congé parental sont soumis à une condition d'alternance entre les deux parents).

 

A court terme, il faut prendre des mesures urgentes pour améliorer la situation des femmes :

- Revaloriser fortement le minimum vieillesse, pour qu’il permette à tous de vivre décemment et augmenter significativement le taux des pensions de réversion (80% pour tous les régimes).

- Les "abattements" sur le montant  de la pension –qui pénalisent à l'excès les carrières courtes en réduisant fortement la pension pour chaque trimestre manquant – doivent être supprimés. Les périodes d'inactivité subie doivent être validées comme durée ouvrant droit à pension.

 

Il faut aussi favoriser l'activité des femmes pour améliorer le financement des retraites

 

Pour régler à terme la question des retraites des femmes dans une logique égalitaire, il faut favoriser l'activité des femmes, leur permettre une carrière continue et à temps plein, et réaliser l'égalité professionnelle.

Augmenter le taux d'activité des femmes implique de développer un service public de garde d'enfants et des services de proximité. Cela suppose aussi de revenir sur des allocations comme l'APE (allocation parentale d'éducation) qui sous une apparence de neutralité s'adresse de fait aux femmes (99% des bénéficiaires) et a pour conséquence leur retrait du marché du travail et des difficultés accrues pour y retourner.

Parallèlement, des mesures doivent être prises pour pénaliser les employeurs qui imposent le temps partiel : une majoration du taux de cotisations sur le temps partiel servirait à compenser les "retraites partielles".

Une revalorisation des salaires contribuerait à une augmentation des cotisations perçues. Cette revalorisation est possible : au cours des 20 dernières années, la part des salaires dans la richesse produite a perdu 10 points ; ces 10 points peuvent être récupérés par un nouveau partage des gains de productivité en faveur des salaires et non plus des profits financiers.

    

 

Dire non à la neutralité actuarielle !

 

Concrètement, ce terme lie le montant de la pension à la durée de vie du (de la) retraité-e :  si on vit plus longtemps, on percevrait moins. Cette logique considère que les cotisations versées reviennent à accumuler un capital, qui se répartit ensuite en pensions mensuelles qui seront inférieures si elles doivent être distribuées plus longtemps. C'est la logique de la capitalisation et non celle de la répartition ; c'est la logique des assurances, où une espérance de vie plus longue est considérée comme un risque plus grand !

L'espérance de vie des femmes étant supérieure à celle des hommes, elles sont particulièrement menacées. La neutralité actuarielle constitue un sommet de la perversité des attaques envers les retraites des femmes : non seulement les femmes sont victimes d'inégalités tout au long de leur vie professionnelle mais on veut les réduire encore au nom de la neutralité actuarielle ! Les femmes assurent toute leur vie active la charge domestique et familiale, ce qu'elles font au détriment de leur propre carrière mais au profit de la carrière des hommes – il est démontré que la présence d'enfants pénalise la carrière des femmes mais favorise celle des hommes-  et au moment de leur retraite, elles devraient encore subir un prélèvement supplémentaire au nom de l'équité envers les hommes ! On mesure le cynisme de la notion de neutralité actuarielle…