Droit
au séjour en raison des liens conjugaux ou de couple :
quelles
conséquences pour les femmes ?
1) les épouses de résidents étrangers admises au
séjour par le regroupement familial
Elles se
voient délivrer le même titre de séjour que leur conjoint. Pour que le
regroupement familial puisse avoir lieu il faut que cet étranger soit en séjour
régulier et satisfasse à des conditions de ressources et de logement
Sauf
circonstances exceptionnelles (et non définies dans la circulaire), le
regroupement familial doit se faire alors que la personne
“ rejoignante ” se trouve encore dans son pays (circulaire III B 5). Donc :
- en cas de mariage sur le territoire français d’une
femme sans titre de séjour avec un résident étranger, il lui est demandé de
repartir pour que la procédure puisse être faite
- beaucoup de femmes entrent rejoindre un époux hors
procédure de regroupement familial, soit que le mari ne réunisse pas les
conditions d’emploi et de logement, soit qu’il incite son épouse à venir en lui
assurant qu’elle pourra ensuite régulariser sa situation. Ces femmes se
trouvent donc durablement en situation irrégulière et parfois confrontées à un
situation de dépendance propice à la violence et sans recours.
L’article 12 bis 7 ne s’applique pas aux conjoints de
résidents étrangers qui ne peuvent donc pas bénéficier d’une régularisation à
ce titre. La procédure de regroupement familial est obligatoire.
Les épouses de polygames ne peuvent obtenir de
titre de séjour ou se le voient retirer, ce qui favorise leur répudiation et
les maintient en situation irrégulière.
En cas de rupture de la vie commune (circulaire V 2 1 et article 29 IV) le titre de
séjour peut pendant l’année qui suit sa délivrance n’être pas renouvelé (titre
de séjour d’un an) ou retiré (carte de résident).
Voir les
articles 29 à 30 bis de l’Ordonnance, le décret du 6 juillet 1999 et la
circulaire du 1er mars 2000
2) les épouses de réfugiés
- si elles sont déjà mariées au moment où leur époux
obtient l’asile, elles obtiennent le même titre de séjour (carte de séjour pour
les personnes admises à l’asile territorial, carte résident pour les personnes
ayant obtenu le statut de réfugié)
- si le mariage a lieu postérieurement à la délivrance
du titre du mari, l’épouse obtient le même titre que son mari au bout de 1 an
de mariage sous réserve de vie commune
Voir les articles 12 ter et 15 de l’ordonnance de 1945
3) les épouses de Français (ou de ressortissant de
l’UE résidant en France)
Selon l’article 12 bis 4, elles obtiennent dès le
mariage ou l’entrée en France une carte de un an. Le contrôle de l’effectivité
de la communauté de vie est effectué à l’occasion du renouvellement du titre de
séjour, selon des modalités définies dans la circulaire du 8 février 1994.
Selon l’article 15 alinéa 1 elles obtiennent au bout
de un an de mariage une carte de résident à condition que la communauté de vie
n’ait pas cessé
Les épouses de Français peuvent de plus demander la
nationalité française par déclaration au bout de un an de mariage
Si la future épouse est en séjour irrégulier au moment
du mariage, il peut y avoir suspicion de “ mariage blanc ”, et
l’officier d’état civil peut saisir le procureur
Voir articles 12 bis 4 et 15 1 de l’ ordonnance de
1945
4) les signataires d’un PACS avec une personne
française ou étrangère en situation régulière
Le délai avant de pouvoir bénéficier d’un titre de
séjour est dorénavant de un an. La personne pacsée reçoit une carte de séjour
d’un an. La vérification de la vie commune a lieu à chaque renouvellement
Voir circulaire du ministre de l’intérieur du 10
décembre 1999, application de l’article 12 bis 7 aux partenaires d’un PACS
(modifiée en 2001 en ce qui concerne le délai)
5) l’article 12 bis Alinéa 7 sur les liens
personnels et familiaux en France
Cet article, qui permet la délivrance d’une carte de
séjour d’un an, donne lieu au maximum
de contentieux et son application, très restrictive, est longuement détaillé
dans la circulaire d’application de la loi du 11 mai 1998. Outre que cet
article ne s’applique pas aux épouses de résidents étrangers, seuls les liens
de couple ou de filiation sont reconnus. Le concubinage doit durer depuis
plus de 5 ans (et une vie de couple sans cohabitation n’est pas
reconnue) : le séjour habituel en France ne doit pas être inférieur à 5
ans, enfin il faut démontrer n’avoir plus d’attaches familiales dans son pays
d’origine. Le couple n’est pas reconnu lorsque les deux partenaires sont en
situation irrégulière.
Voir Article 12 bis de l’ordonnance de 1945 et
circulaire d’application de la loi de mai 1998 (12 mai 1998)
Remarques
sur les conséquences de la nécessaire communauté de vie
Le caractère effectif d’une communauté de vie
est une condition au renouvellement de la carte de séjour ou à la délivrance de
la carte de résident. Cette dépendance juridique dure donc un minimum de un
an (plus les quelques mois nécessaires à la délivrance du titre). L’épouse
devant présenter les papiers du mari et les preuves d’un domicile commun, si le
mari s’y oppose, elle peut se trouver dans l’impossibilité de faire les
démarches nécessaires. On rencontre ainsi des situations de femmes maintenues
dans une situation d’esclave domestique.
De plus le titre de séjour (y compris la carte de
résident) peut être retiré à tout moment si le mariage est considéré comme
ayant été frauduleux : un
divorce ou une séparation précoce, une dénonciation de la part du mari, peuvent
inciter l’administration à considérer qu’il y a eu fraude.
Conclusions
La nécessité du mariage ou d’une vie de couple stable
pour la délivrance d’un titre de séjour pousse des femmes à se tourner vers le
mariage comme condition du droit au séjour ou d’une régularisation
L’exigence du maintien de la vie commune pour la
délivrance ou le renouvellement des titres pose des problèmes en cas de
séparation, de violences conjugales, permet des abus de la part du mari et
place les femmes en situation de dépendance.
Les difficultés du regroupement familial sur place
font que de nombreuses épouses d’étrangers sont maintenues en situation
irrégulière.
Les épouses de polygames subissent lourdement les
conséquences d’une situation dont elles ne sont pas responsables.
La
circulaire du 19 décembre 2002 : quels éléments nouveaux ?
La circulaire du ministre de l’intérieur du 19
décembre 2002 évoque le cas des femmes dans
deux passages :
- 1-5 sur la consultation de la commission du titre
de séjour : celle ci peut être sollicitée “ en cas de rupture
de la vie commune quand l’épouse d’un étranger détenteur d’un titre de séjour
est répudié par cet étranger ou que, victime de violences de sa part, elle
choisit de s’en séparer ”
Remarquons que le cas de l’épouse d’un Français
victime des même faits n’est pas pris en considération, et que la réunion de la
commission n’est pas une obligation mais une possibilité.
- 2.2.5 sur le pouvoir discrétionnaire du préfet :
le préfet peut à titre exceptionnel, et en fonction de situation individuelles,
examiner de façon spécifique le cas des “ femmes victimes de violences,
mariages forcés, répudiations ”.
Ce sont des mobilisations individuelles et collectives
qui ont conduit à cette prise en compte de la situation des femmes, et il nous
faut nous appuyer sur ce document, mais c’encore très insuffisant car il ne
s’agit que du pouvoir d’appréciation du préfet, au cas par cas, et non d’une
mesure globale.
Mars 2003
RAJFIRE
Réseau
pour l’autonomie des femmes immigrées et réfugiées
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