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Une attaque scandaleuse
contre les femmes les plus précarisées !
Le Collectif National pour
les Droits des Femmes avait dénoncé, dès avril 2003, certains projets de J.-P.
Raffarin concernant les allocations familiales, avec sa « Prestation
d’Accueil du Jeune Enfant » (PAJE) destinée, soi-disant, à simplifier les
prestations. Nous pointions en particulier la pression qu’allait exercer le
volet dit « allocation de libre choix » : offerte dès le premier
enfant, elle n’avait d’autre but que de tenter de retirer des femmes du marché
du travail. Quant à la nouvelle « prime de naissance », nous ne
faisions que souligner, avec un certain étonnement, qu’elle
« étendait aux classes moyennes, et cela dès le premier enfant,
l’allocation pour le jeune enfant (APJE) que seuls percevaient les ménages
modestes dont les revenus n’excédaient
pas 1907 ¤ par mois. Le nouveau plafond de revenus serait de 4100 ¤
!mois. Cette prime accordée à de très larges classes moyennes constitue une
fameuse addition. » Nous ignorions alors le mauvais coup qui se préparait
pour les plus bas revenus.
Appliquée depuis le 1er janvier 2004, pour
une naissance survenue à partir de cette date, la PAJE est certes une bonne surprise pour les 200
000 foyers aisés (plafond de revenus relevé à 4575 € / mois) qui fêteront désormais
une naissance. L’ennui, c’est qu’elle va se payer par des restrictions
scandaleuses concernant l’Allocation Parent Isolé (API) !
L’API qui est versée à des mères seules, en situation
de grande précarité, complète leurs ressources pour garantir un revenu mensuel
de 806 € pour une famille monoparentale avec un enfant (jusqu’aux 3 ans de
l’enfant). Mais elle pouvait jusqu’ici être cumulée, grâce à une dérogation
spéciale, avec l’Allocation Pour Jeune Enfant (APJE) attribuée à des familles
modestes : 1300 €, en plusieurs mensualités durant les mois qui entourent la
naissance. Avec la mise en application du PAJE, cette dérogation est supprimée,
comme nous le révèle l’excellent article de Blandine Grosjean (Libération,
2 févr. 04). Désormais, les 40 000 familles monoparentales – des mères isolées
en situation précaire - vont toucher une API rognée du montant du PAJE (1300 €
en quelques mois, exactement ce que leur accordait l’ancienne APJE*)… alors que
200 000 ménages plus aisés pourront toucher cette manne !
Un scandale qui, sans cet article, serait passé
inaperçu… Le gouvernement espérait sans
doute faire passer ce mauvais coup en catimini, comptant que les nouvelles
mères isolées touchées par cette mesure inique n’y verraient que du feu, et
qu’elles sont bien peu à même de mener la bataille.
Le Collectif National pour les Droits des Femmes, qui
a toujours combattu aussi bien pour la justice sociale et pour une
redistribution des richesses que pour les droits des femmes et la progression
du féminisme, proteste avec véhémence contre cette mesure qui frappe les femmes
les plus démunies. Il est urgent que le gouvernement Raffarin fasse marche
arrière dans cette casse organisée de la protection sociale, qui frappe
particulièrement les femmes de milieu modeste. Nous appelons associations,
syndicats et partis progressistes à réagir auprès du Premier Ministre et du
Ministre de la famille.
Le 8 mars 2004 sera, plus que jamais, pour les
féministes et, à leurs côtés, pour celles et ceux qui sont épris de justice, un
8 mars combatif où nous dénoncerons le marasme social et les mesures iniques de
ce gouvernement qui aggravent la situation des femmes.
Nous appelons à une grande manifestation unitaire pour
les droits des femmes
le samedi 6 mars !
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Quelques précisions ;
APJE dite courte : 160 € / mois, du 5° mois de
grossesse aux 3 mois de l’enfant : 8 mois x 160 = 1300 €. Elle était
cumulable avec l’API
API : garantit un revenu mensuel à hauteur de 530
€ du 5° mois de grossesse à la naissance, 806 € à partir de la naissance.
La PAJE : 800 €
de « prime de naissance » (au 7° mois)
+ puis « allocation de base », d’un montant
équivalent à l’APJE : 160 € /mois de la naissance jusqu’aux 3 ans de
l’enfant
+ soit un « complément de libre choix
d’activité », c.à.d. de retour à la maison (333 €, mais 493 € si famille,
ayant un revenu supérieur au plafond, ne touche pas l’allocation de base).
Cette allocation est l’équivalent de l’allocation parentale d’éducation, APE,
mais elle est étendue au premier enfant.
Soit
un « complément de garde » pour une assistante maternelle ou pour une garde à domicile. On retrouve ici
les anciennes AFEAMA et AGED (Aide à la Famille pour Emploi d’une Assistante
Maternelle agréée et Aide pour la Garde d’Enfant à Domicile). Ces compléments
comprennent :
La prise en charge des cotisations sociales à 100%
pour l’assistante maternelle, à 50% pour la garde à domicile + un complément
forfaitaire modulable suivant les ressources de la famille (de 150 à 350 €) +
des réductions d’impôt comme précédemment pour AFEAMA ou AGED.
La PAJE n’est pas cumulable avec l’API,
elle diminue d’autant son montant. Les familles monoparentales déjà en
situation de grande précarité vont y perdre les 1300 euros * que leur donnait
l’APJE courte…L’économie réalisée sur
leur dos sera de 50 millions d’euros, les dépenses supplémentaires en faveur
des classes moyennes d’un milliard d’euros.
Indépendamment même de cette mesure de
dernière minute, la CNAF avait calculé que ce nouveau système était défavorable
aux familles modestes. Par ailleurs, sous la dénomination unique de PAJE, il
n’a rien simplifié, bien au contraire…
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*
Une responsable de la CNAF précise qu’il s’agirait de 1000 € et non de 1300. La
complexité du système fait régner une confusion sans pareille…