ALGERIE,
LE CODE DE LA FAMILLE, VINGT ANS BARAKAT !
Le 29 août 1962, les femmes et les hommes d’Alger descendent dans la rue aux cris de « Sept ans ça suffit ! » (barakat), pour tenter de mettre fin à la guerre civile qui, durant l’été 1962 ensanglante le pays nouvellement libéré, et de redonner sens à l’indépendance.
Sous le mot d’ordre
« Vingt ans ça suffit ! » les associations de femmes algériennes
lancent une campagne contre le code de la famille, voté en 1984. Elles veulent
rappeler qu’on ne peut pas parler d’indépendance en maintenant la moitié de la
population, les femmes, dans l’infériorité et la dépendance vis à vis du père,
du mari, du frère du tuteur.
Car il y aura bientôt 20
ans que le code de la famille est en vigueur, en contradiction avec la
Constitution algérienne qui affirme dans son article 29 l’égalité entre
les hommes et les femmes. Il traduit une parfaite convergence entre les
islamistes qui commencent à apparaître au grand jour et le parti unique (FLN) au
pouvoir.
Ce code institutionnalise
une sous-citoyenneté pour les femmes qui se manifeste par des discriminations
systématiques :
-
pour conclure un mariage, la femme même majeure
doit avoir un tuteur matrimonial (article 11)
-
l’épouse « doit obéir à son mari et lui
accorder des égards en sa qualité de chef de famille » (article 39)
-
un homme peut épouser plusieurs femmes (article 8)
-
une femme ne peut pas demander le divorce (sauf
situation très particulières, article 53) ou bien elle doit payer pour
« racheter sa liberté (article 54) ; elle ne peut garder le logement
familial (article 52) si l’époux prend la décision d’un divorce unilatéral.
-
le père est le tuteur des enfants mineurs, même
après la séparation du couple (article 87)
-
une femme ne peut épouser un non musulman alors
qu’un homme peut épouser une non musulmane (article 31)
-
en matière d’héritage, une femme ne reçoit que la
moitié de la part d’un homme (livre 3ème).
Ce tissu législatif tramé
d’injustices permet et entretient la fragilisation et l’éclatement de la
société :femmes divorcées mises à la rue avec leurs enfants, mères
célibataires stigmatisées, enfants nés hors mariage sans droits et parfois sans
nom… Les violences quotidiennes contre les femmes, les viols collectifs et les
exactions comme ceux commis à Hassi Messaoud en juillet 2001, les enlèvements,
l’esclavage sexuel et les massacres dont des milliers de femmes sont l’objet
depuis plus d’une dizaine d’années, s’inscrivent dans ce contexte.
Les femmes de nationalité
ou d’origine algérienne vivant en France, ainsi que les Françaises épouses
d’Algériens, sont concernées. Le code civil français stipule que les personnes
étrangères sont soumises aux lois de statut personnel du pays dont elles ont la
nationalité, comme le confirment les accords bilatéraux franco-algériens.
Ainsi, un mari installé en France avec son épouse peut aller divorcer en
Algérie, rapidement et à son entier avantage, et éventuellement emmener et
retenir les enfants en Algérie. L’épouse n’est pas dénuée de tout droit dans la
mesure où elle peut invoquer l’atteinte à l’ordre public français, mais les
recours sont longs, coûteux et difficiles.
A cela s’ajoute la
dépendance imposée aux femmes mariées à un Français ou à un résident étranger
du fait des lois sur l’entrée et le séjour des étrangers, car dans ce cas
l’obtention d’un titre de séjour dépend du bon vouloir du mari.
Toutes ces dispositions
entérinent et renforcent les rapports sociaux inégalitaires entre hommes et
femmes et les mentalités patriarcales et sont un frein au changement de la
société et à l’émancipation des femmes. En France, les discriminations à
l’encontre des immigrés, la ségrégation dans l’habitat, le racisme à
l’embauche, risquent d’entraîner un repli communautaire et une pression sociale
qui accentue l’oppression des femmes et les empêche de faire valoir leurs
droits.
20
ANS ÇA SUFFIT !
Les associations de
femmes en Algérie n’ont pas cessé de dénoncer le code de la famille. Elles en
demandent l’abrogation, soulignant son caractère discriminatoire et
anticonstitutionnel. Elles revendiquent des lois civiles égalitaires. Aucun des
gouvernements qui se sont succédé en Algérie n’a accepté ne serait-ce que
d’amender le moindre article de ce code. En coordination avec la lutte en
Algérie, une campagne est organisée aussi en France. Plusieurs actions sont
lancées dans plusieurs villes de France (Nantes, Dijon…) et dans la région
parisienne.
Nous appelons les associations et les personnes intéressées à rejoindre le collectif « 20 ans barakat », à soutenir cette campagne et à multiplier les initiatives.
POUR
L’ABROGATION DE CE TEXTE INIQUE !
Coordination
8 mars, novembre 2003 – 94 Bd Masséna
75013 PARIS- tel : 01 53 79 18 73 mail : barakat20ans@aol.com