Recommandation 1450 (2000)1
Violence à l’encontre des femmes en
Europe
1. L’Assemblée dénonce
l’accroissement considérable du nombre de femmes victimes de la
violence dans les Etats membres du Conseil de l’Europe. Chaque
jour, en Europe, une femme sur cinq est victime de la
violence.
2. Ainsi, des centaines de
milliers de femmes sont confrontées à des violences physiques et
psychiques, chez elles où à l’extérieur, des violences qui sont
parfois perpétrées par les pouvoirs publics ou des structures
coercitives. C’est ainsi que l’oppression des femmes, telle
qu’elle se manifeste à travers la violence domestique, les viols
et les mutilations sexuelles, est une réalité connue et dénoncée
dans de nombreux pays.
3. L’Assemblée rappelle son
soutien au Plan d’action de Pékin lors de la Conférence des
Nations Unies sur les femmes (1995), où les différentes atteintes
aux droits des femmes ont été clairement définies et
condamnées.
4. L’Assemblée constate
que, bien que la violence domestique soit l’une des formes les
plus communes de la violence contre les femmes, elle demeure la
moins visible. Pourtant l’on estime qu’elle tue ou blesse
grièvement chaque année en Europe plus de femmes que le cancer ou
les accidents de la route, et qu’elle entraîne des coûts humains
et matériels aussi bien au niveau des services médicaux et de
santé qu’à celui de l’emploi, de la justice et de la
police.
5. L’Assemblée condamne par
conséquent la violence envers les femmes en tant que violation
générale de leurs droits en tant que personne : le droit à la
vie, à la sécurité, à la dignité et à l’intégrité physique et
mentale.
6. Elle condamne le fait
que, dans quelques Etats membres, subsistent des meurtres dits
d’honneur, des mariages forcés et d’autres formes de sacrifices,
et souligne la nécessité de prendre des mesures urgentes pour
punir tous les actes criminels commis sous le couvert des
traditions ou de la religion.
7. L’Assemblée condamne
tout aussi fermement les mutilations sexuelles encore trop souvent
pratiquées au nom de coutumes ou de traditions culturelles ou
religieuses, qui constituent des tortures infligées de façon
barbare aux jeunes filles ; en conséquence, elle appelle les
Etats membres à mettre en œuvre les mesures proposées dans sa
Recommandation 1371 (1998).
8. Elle condamne également
l’ampleur prise par la traite et la prostitution dans les Etats
membres du Conseil de l’Europe par le biais de réseaux
internationaux dont les activités constituent l’un des plus grands
secteurs de la criminalité organisée.
9. L’Assemblée reconnaît le
rôle considérable des organisations non gouvernementales (ONG)
dans la défense des droits des femmes et dans la lutte contre les
différentes formes de violence qu’elles subissent, et demande aux
Etats membres de soutenir pleinement leur action aux niveaux
national et international.
10. L’Assemblée recommande
par conséquent au Comité des Ministres:
i. d’élaborer un programme
européen de lutte contre la violence à l’encontre des femmes
visant notamment à:
a. une harmonisation des législations et des procédures afin
de créer un véritable droit positif européen;
b. l’introduction d’une législation contre toutes les formes
de violence domestique;
c. la reconnaissance et la criminalisation du viol
conjugal;
d. une protection accrue des femmes, par l’interdiction, par
exemple, du domicile conjugal au conjoint violent et des mesures
prévoyant une application efficace des peines et des
condamnations;
e. un accès plus souple à la justice et aux différentes
procédures, en prévoyant notamment la possibilité pour les organes
compétents d’exercer leur action ex officio, des
auditions à huis clos, une composition paritaire des
tribunaux;
ii. d’élaborer une charte
européenne du travail domestique;
iii. d’inviter les Etats
membres à:
a. ratifier, s’ils ne l’ont pas encore fait, et à mettre en
œuvre la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes
les formes de discrimination à l’égard des femmes ainsi que son
protocole;
b. renforcer le rôle de l’Observatoire de la violence à
l’encontre des femmes de l’Union européenne;
c. mettre en œuvre les mesures préconisées dans la
Recommandation 1325 (1997) relative à la traite des
femmes et à la prostitution forcée dans les Etats membres du
Conseil de l’Europe, et à prévoir très rapidement des crédits
substantiels pour des programmes de soutien et d’assistance aux
victimes du trafic d’êtres humains;
d. intensifier la collaboration internationale des
institutions étatiques et des ONG pour une meilleure protection
des victimes du trafic des femmes, ce qui suppose, entre autres
mesures, une sensibilisation et une formation accrues des
personnes qui sont en premier en contact avec les victimes
potentielles du trafic des femmes;
e. mettre en place un programme de formation à l’attention du
personnel de la police et de la justice appelé à s’occuper des
femmes victimes de la violence;
f. encourager le recrutement de femmes officiers de
police;
g. mettre en place des centres d’accueil pour les femmes
victimes de la violence;
h. mettre en place des campagnes d’information et de
sensibilisation pour former le public sur l’inacceptabilité de la
violence contre les femmes et entreprendre des activités de
prévention pour promouvoir des relations basées sur
l’égalité.
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