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RECOMMANDATION 1261 (1995)[1]

relative à la situation des femmes immigrées en Europe

 


  1. Les femmes constituent près de la moitié de la population immigrée en Europe. Les politiques d'intégration adoptées par les pays d'accueil ne semblent pas suffisamment adaptées aux besoins et aux problèmes spécifiques de ce groupe.

  2. L'Assemblée rappelle sa Résolution 1018 (1994) et sa Recommandation 1229 (1994) relatives à l'égalité des droits entre les hommes et les femmes, ainsi que la Déclaration sur l'égalité des femmes et des hommes adoptée par le Comité des Ministres le 16 novembre 1988, selon laquelle «les discriminations fondées sur le sexe dans les domaines politique, économique, social, éducatif et culturel, ou dans tout autre domaine, constituent des entraves à la reconnaissance, à la jouissance ou à l'exercice des droits de la personne humaine et des libertés fondamentales». Les femmes immigrées - pas plus que toute autre catégorie de femmes - ne peuvent être privées de ces droits et principes.

  3. L'Assemblée se préoccupe de la situation des femmes immigrées, dont un grand nombre vivent en marge de la société et affrontent des difficultés plus graves que les hommes immigrés. Lorsqu'elles sont mariées, elles sont souvent confinées au foyer et isolées de la société locale, affectées à des tâches domestiques, sans possibilités réelles d'apprendre la langue du pays d'accueil, renforçant ainsi leur isolement. Lorsqu'elles travaillent, elles occupent souvent des emplois peu considérés qui ne leur permettent pas d'accéder à une plus grande autonomie et de s'intégrer à la société d'accueil.

  4. La condition des femmes immigrées dépend souvent du statut juridique de leur mari ou de leur père et elles sont considérées dans les politiques existantes comme des personnes à charge.

  5. En raison des difficultés qu'elles éprouvent à obtenir un permis de travail, ainsi que lorsqu'elles perdent leur statut légal à la suite d'un divorce ou du décès du mari, de nombreuses femmes immigrées sont obligées d'accepter des emplois illégaux, ce qui les prive d'une protection sociale adéquate et d'une rémunération équitable.

  6. Les femmes immigrées s'organisent de plus en plus et créent des associations afin de défendre leurs droits légitimes. Si ces organismes ne manquent pas d'idées quant à l'amélioration de la situation des femmes, ils ont besoin de soutien, notamment financier, en vue de l'élaboration d'analyses et d'enquêtes pour mieux appuyer leurs revendications devant les autorités des pays d'accueil.

  7. L'Assemblée estime que les Etats membres du Conseil de l'Europe ont le devoir de tout mettre en œuvre pour éliminer les injustices et les discriminations dont sont victimes les femmes immigrées, et d'adopter des mesures qui visent leur intégration harmonieuse dans la société.

  8. L'Assemblée recommande par conséquent au Comité des Ministres:

  1. d'examiner l'effet des lois nationales sur le statut juridique des femmes immigrées en vue de l'élimination de toute discrimination à leur égard et d'une harmonisation en la matière;

  2. d'étudier la question des obstacles à l'acquisition de la nationalité du pays de résidence et à la reconnaissance de la double nationalité permettant aux femmes immigrées de préserver les liens avec leur société d'origine tout en s'intégrant dans la société d'accueil;

  3. d'examiner la question de l'application de critères spécifiques aux femmes dans la procédure de détermination du statut de réfugié dans les Etats membres;

  4. d'encourager la mise en place d'un système européen de collecte de données concernant la situation des femmes immigrées.

  1. L'Assemblée recommande également au Comité des Ministres d'inviter les Etats membres:

  1. à assurer par la loi et dans la pratique l'égalité de traitement aux femmes immigrées;

  2. à reconnaître le droit au regroupement familial aux femmes et aux hommes immigrés sans distinction;

  3. à adopter une législation reconnaissant un droit indépendant et autonome de résidence aux femmes immigrées (non lié au statut de résidence de leur mari);

  4. à reconnaître aux femmes immigrées le droit à un permis de travail indépendant de leur situation familiale;

  5. à accorder une attention particulière à la prévention et à la répression des pratiques coutumières violentes ou dégradantes à l'égard des femmes immigrées ou portant atteinte à leur intégrité physique;

  6. à développer des dispositifs de formation professionnelle adaptés à la situation et à la culture des femmes immigrées;

  7. à développer des programmes d'information spécifiques aux femmes immigrées portant:

  1. sur leurs droits;

  2. sur les possibilités d'éducation, de formation professionnelle et d'emploi qui leur sont offertes dans les pays d'accueil;

  1. à s'assurer que les services d'assistance sociale recrutent et forment leur personnel parmi les femmes immigrées, entre autres;

  2. à encourager la participation des femmes immigrées à la vie sociale et politique, à les associer à la prise des décisions les concernant et à soutenir les associations œuvrant dans ce sens;

  3. à aider les associations d'immigrées à former des réseaux par la mise à disposition de moyens financiers et de locaux, ainsi que par la formation du personnel issu des milieux des immigrées;

  4. à ratifier, si ce n'est pas déjà fait, la Convention européenne sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local, la Convention européenne sur le statut des travailleurs migrants, la Convention internationale des Nations Unies sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ainsi que la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toute sorte de discrimination à l'égard des femmes;

  5. à tenir compte, lors de la détermination du statut de réfugié, des persécutions fondées sur l'appartenance sexuelle ainsi que de la menace spécifique que représente l'extrémisme religieux pour les femmes;

  6. à appliquer dans leurs politiques de réfugiés les principes contenus dans les Conclusions no 64 (1990) sur les femmes réfugiées et la protection internationale, adoptées par le Comité exécutif du Programme du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR);

  7. à encourager la recherche sur la situation des femmes immigrées.


[1] Texte adopté par la Commission Permanente, agissant au nom de l'Assemblée, le 15 mars 1995. Voir Doc. 7251, rapport de la commission des migrations, des réfugiés et de la démographie, rapporteuse: Mlle Guirado.